A Bastogne, au cœur même de l'Ardenne, un couvent abandonné du XVIIe siècle a connu, grâce à de nombreuses aides, un début de restauration et un souffle nouveau. On se devait de conserver au couvent dit «de Bethléem», dans sa disposition et son cadre approprié, un prolongement de service, une continuité de la présence des Récollectines, des Sœurs de la Charité et des Franciscaines qui l'avaient, successivement, animé jusqu'en 1981.

Un groupe de bénévoles, bénéficiant des avis et conseils de personnes qualifiées, y a suscité une dynamique de sauvetage du patrimoine religieux en péril et un centre d'études des croyances populaires.
Dans le quartier de la Piconrue, non loin d'autres couvents disparus, tels ceux des Trinitaires et des Récollets, un musée fut ainsi créé. Un de plus, en ces temps difficiles! Ceci n'explique-t-il pas cela?

Les vols, les disparitions, les déprédations (voir photos de la présente introduction avec leurs commentaires) se sont multipliés. A ce phénomène inquiétant s'ajoute la diminution du nombre des gardiens naturels du patrimoine religieux, les prêtres. L'évolution des temps accélère la disparition des croyances populaires : notre « mémoire collective » est en péril. Sans vouloir nous substituer aux fabriques d'églises, notre désir est de nous mettre à leur service et de collaborer dans cette œuvre de sauvegarde. Le musée n'est pas le fruit d'une imagination mais d'une nécessité. Il n'existait, dans la province de Luxembourg, aucun créneau permanent spécifique à ce type de préoccupation.

Le terme de musée, dans cette entreprise, risque de donner une perspective erronée des buts poursuivis; mais il ne sera jamais pour nous qu'une dynamique de mise en valeur et non une fixation.
En ces temps de restrictions budgétaires, pourquoi créer du neuf si ce n'est pour que l'avenir ne doive se contenter du vide ? Il ne faut pas que l'héritage de nos ancêtres disparaisse. Il est donc essentiel que des études et des expositions en ravivent la teneur.

L'an dernier, l'exposition sur « Les Saints Protecteurs et Guérisseurs en Ardenne » a permis d'ouvrir la clôture du couvent. Cette manifestation d'envol fut l'occasion de sensibiliser l'opinion à l'ouverture d'un musée permanent d' « Art religieux et croyances populaires en Ardenne et Luxembourg ». La vague d'intérêt suscitée à cette occasion prouve à suffisance que le projet répond à des aspirations profondes.

En ouvrant ses portes en 1987, le musée témoignera de sa permanence.

Le thème des « Saints Protecteurs et Guérisseurs » en restera la base et le fil conducteur.

Si, d'un point de vue artistique, l'Ardenne n'a jamais pu, ou rarement, s'offrir le luxe de grandes œuvres, elle a travaillé de ses mains d'artisan les images de son culte. Elle a droit au respect de son travail et du patrimoine qui en est le reflet. Il est donc essentiel, devant ces témoignages, de voir et de comprendre, avant d'admirer.

Montrer et faire comprendre, et par là susciter l'éveil à la sauvegarde, sont des tâches à long terme. Beaucoup de fabriques d'églises et de nombreux particuliers en ont compris l'esprit. De leur confiance, nous remercions les uns pour les dépôts dont ils restent propriétaires légaux et les autres pour leurs dons au patrimoine commun.

Les réserves du musée s'enrichissent et l'avenir permettra progressivement de les insérer dans des thèmes spécifiques lors d'expositions ultérieures. C'est pourquoi l'album édité cette année ne se veut pas exhaustif. Notamment au catalogue publié en fin de ce volume, le musée ajoutera, dans les quelques salles restaurées à ce jour, des groupements d'objets suggestifs de thèmes à venir, tels celui de la statuaire mariale, de l'orfèvrerie, des ornements liturgiques, du livre, des images d'art populaire et des objets du folklore.