Raconter l’histoire de Bruxelles est une ambition qui a été portée par bien des historiens. Certains ouvrages donnent dans la vulgarisation, d’autres approfondissent un moment clé de l’évolution, certains prétendent à une certaine exhaustivité et suscitent la controverse, d’autres encore, richement illustrés et reliés s’apparentent aux « beaux livres ». Aborder l’histoire de Bruxelles par cette formule qui allie BD et texte demeure donc exceptionnel. À ma connaissance, une démarche similaire ne s’était plus produite depuis les festivités qui ont célébré le millénaire de Bruxelles en 1979, avec le Bruxelles de Jean-Luc Vernal dessiné par Franz. Quant au « Brüsel » de Schuiten et Peeters, il s’agit d’une oeuvre remarquable mais à répertorier parmi la cartographie des « Cités Obscures ». Le « Bruxelles » qui nous occupe a l’avantage d’allier la rigueur historique du récit à un ensemble de planches de bande dessinée particulièrement soigné. Force est de le constater, le travail de Nicolas Van De Walle inspiré par le regretté Jacques Martin correspond à merveille à ce projet.

Je présume que cette conception, sans doute plus ludique, stimulera certaines passions latentes. Mais ne me méprenez pas car si je dis ludique, cela ne signifie nullement que l’illustrateur ait pris des libertés non permissibles avec l’Histoire. Il faut reconnaître que Nicolas Van De Walle a fait cadrer une science fiction qu’il connaît bien avec la réalité. Certes, ¡I nous livre des planches de BD qui ne sont pas le résultat strict de la transposition d’une incontestable iconographie historique. Cependant, ses scènes splendidement dessinées n’exagèrent en rien la réalité supposée ; la fantaisie est exclue au profit d’un imaginaire séduisant et rigoureux ; les échelles sont respectées ; le trait est d’une grande maîtrise et les couleurs des drapeaux, des fanions, des étoffes,... sont en accord parfait avec la connaissance historique.

Bruxelles en proie aux flammes, Bruxelles qui déroule ses fastes, tout est raconté à travers ce livre ! Quant aux incertitudes qui planent encore sur certaines origines, Jacques Martin les a très honnêtement reléguées aux futures explorations archéologiques, qui ne manqueront pas d’affiner encore l’exactitude historique et-pourquoi pas ? - de donner lieu à de nouvelles éditions de ce précieux ouvrage.

Jacques Martin, il serait bien présomptueux de vouloir le cerner en quelques phrases. Son parcours est jalonné de repères combien prestigieux : sa collaboration avec Hergé, les aventures d'Alix,... Il n’a par ailleurs jamais été réfractaire aux collaborations qu’il considérait comme un enrichissement et, finalement, une nécessité puisqu’il souffrait d’une maladie des yeux. Celle qu’il avait entamée avec Nicolas Van De Walle pour l’album Carcassonne, et qui malheureusement trouve ici son point final, demeurera sans nul doute comme une des plus réussies.

À la suite de Jhen, remontons aux origines d’une ville qui fut le théâtre de moments déterminants de l’Histoire et qui en comporte encore bien des témoins.