Lorsque, au seuil du siècle dernier, Georges Cuvier publiait son mémorable ouvrage sur les « Ossements fossiles », la Paléontologie prenait naissance en tant que science digne de ce nom. Jusque là empirique, elle entrait, avec l’Anatomie comparée qui fut également création du génial naturaliste, dans une phase nouvelle de sa montée : celle de l’étude rationnelle. Quoique au sens le plus élevé, il ne s’agissait pourtant encore que de pure Morphologie. Plus tard seulement, vint s'imposer l’idée d’Evolution, amenant des paléontologistes à rechercher les filiations entre des formes qu’ils décrivaient, en un mot à faire de la Phylogénie. La Systématique devait s'en trouver considérablement enrichie et, en bien des points, précisée. C’est un des titres de gloire de la Paléontologie d’avoir ouvert la voie à ce progrès.

Ensuite, et tandis que progressait de son côté la Paléontologie stratigraphique qui devait jouer un si grand rôle dans l’établissement des corrélations géologiques, de nouvelles disciplines biologiques, en étroite relation avec la Paléontologie, prenaient place parmi les préoccupations des chercheurs et achevaient ainsi de donner à cette branche des études de la Vie sa valeur de science majeure. Ainsi naquit notamment, grâce à des esprits tels que Moseley, L. Dollo, et d’autres, la Paléontologie éthologique ou Paléoéthologie, avec laquelle les formes éteintes reprenaient en quelque sorte vie, puisqu’il s’agissait, cette fois, d'interroger leur morphologie pour en déduire leur comportement. En sorte que, depuis, le « Monde perdu », pour employer l’expression rendue célèbre par Conan Doyle, est loin de l’être absolument.

Au cours des lignes qui vont suivre, l’occasion nous sera donnée d'en voir un des plus beaux exemples car, entre autres vertébrés fossiles, les Iguanodons de Bernissart devaient fournir à Louis Dollo l'un des meilleurs champs d’application de cette féconde méthode. L’art qu’il déploya en cette occurrence eut même pour résultat une connaissance de ces vertébrés éteints telle qu’il est permis d’affirmer, sans crainte d’exagération, que peu d’organismes actuels sont mieux connus, ni même aussi bien connus, qu’eux, et cela à plus d’un égard.

Venus s’ajouter à ceux déjà acquis à cette date, d’autres progrès dans l’étude même des fossiles ont permis depuis de pousser plus avant l’investigation sur des bases rationnelles. Pour n’en prendre qu’un exemple, disons que c’est à l’expression mathématique de la morphologie des formes éteintes et [...]