ANDERLECHT est fière de sa Maison d’Erasme; elle a le droit de l’être sans orgueil mal placé. Notre vieille cité lui fait une place de choix dans les souvenirs historiques quelle cultive avec tendresse. Elle est, cette Maison d’Erasme, avec son Musée, un joyau du passé d’où rayonne, lumière limpide, l’authentique pensée érasmienne. On sait la richesse de ses collections, le goût averti qui a présidé à l’ordonnance de ce décor unique où revit Erasme, dans toute son émouvante intensité. Quoi d’étonnant si des milliers de nos contemporains ont fait de la Maison d’Erasme un lieu de pèlerinage. Ils y viennent puiser, en même temps que la connaissance d’un prince de l’humanisme, la substance salvatrice d’une conception idéaliste de la vie. Car ce qui fait la pérennité d’Erasme, ce qui lui confère une indicible grandeur, c’est qu’il relève de ce qu’il y a de meilleur et de plus fin dans l’homme, au travers de la longue chaîne de ses douleurs comme de ses joies. Par l’acuité de ses vues, l’ironie si sagace quoique indulgente de ses propos, il a su dominer de très haut le monde où il vivait : monde bien primitif, où l’instinct laissait peu de place à la raison et au sentiment. Dans ce monde-là Erasme a projeté le jet de lumière de ses études si pénétrantes. Ce qu’il nous a transmis ajoute au capital d’intelligence et de sensibilité dont l’humanité, malgré tant de persistantes défaillances, peut tirer quelques motifs de satisfaction. Bien des siècles nous séparent du penseur et du philosophe. Et peut-être, s’il nous revenait, serait-il surpris du spectacle qu’offrirait à ses regards ce vingtième siècle, ravagé de tragiques contradictions. Combien [...]