Qui ne connaît, même d’avoir ouï dire, le petit bourg bien ardennais de Saint-Hubert, blotti dans l’écrin de ses vastes forêts ? L’évêque de Liège, Hubert, n’y a certes jamais vécu, mais en 825 ses reliques y furent déposées en grande pompe dans des circonstances qui sont rapportées avec précision dans le « Can-tatorium » ou Chronique de l’abbaye de Saint-Hubert.

Peu à peu, cependant, les miracles suscités autour de son tombeau déclenchèrent quantité de pèlerinages dont la vogue n’est pas près de s’éteindre, malgré l’absence actuelle des restes de l’inoubliable prélat mérovingien.

Autour de la « cella » primitive s’érigea une opulente abbaye bénédictine qui connut, durant mille ans, les bonnes et mauvaises fortunes du temps.

Ainsi passèrent cinquante moines investis des pouvoirs de la crosse abbatiale, sévère par les uns, débonnaire sous les autres. Le dernier Abbé — le cinquante et unième — Dominique Nicolas Spirlet fut de bien loin le plus original de cette imposante lignée monastique.

Promu en 1760 chef spirituel de la petite communauté hubertine, il s’ingénia avec beaucoup d’intelligence à pourvoir aux défaillances d’une trésorerie, malmenée par le faste des abbés précédents, en créant de toutes pièces une série d’industries nouvelles. On peut dire résolument qu’il donna une ultime impulsion aux tentatives commerciales de la Terre de Saint-Hubert, pratiquement inexistantes dans ce cadre immuable d’une économie sans envergure.

Conçues par une imagination très aiguisée, pour la plupart, elles échouèrent faute de capitaux suffisants et de collaborateurs désintéressés.