Un livre sur St-Josse-ten-Noode ! Et qui plus est, un livre écrit par
Yvonne du Jacquier, archiviste de cette belle et opulente commune ! Voilà
une aubaine comme il ne s'en présente pas souvent!

Disons-le tout net ! La chance est double. Tout d'abord, la signature que
porte ce volume constitue le gage le plus sûr de sa valeur littéraire.
Tour à tour romancière, essayiste, conférencière, son auteur a fait ses
preuves. On sait que c'est un écrivain de qualité. Au style limpide,
alerte et chaleureux ! Yvonne du Jacquier excelle à faire parler les
pierres. De plus, elle est douée de ce magnétisme particulier — car c'en
est réellement un — que l'on appelle le don d'évocation. Il consiste non
seulement à ressusciter les souvenirs, ce qui est déjà difficile, mais à
les maintenir en vie au point d'en peupler la mémoire de ses auditeurs ou
de ses lecteurs.

A côté de cela, Yvonne du Jacquier exerce les fonctions d'archiviste de
Ten-Noode. C'est dire qu'elle est, en quelque sorte, la gardienne même des
sources d'information auxquelles elle alimente ses écrits, et qu'elle
possède ainsi les clés de tous les secrets du domaine enchanté qu'on lui a
si opportunément confié.

II est donc impossible de souhaiter un guide plus averti, un cicérone plus
érudit et plus charmant. Et notons-le bien, cette commune de St-Josse que
nous nous préparons à visiter en sa compagnie, c'est précisément son
douaire.

St-Josse, heureux terroir ! On en vient même parfois à se demander si ce
n'est pas le plus heureux coin de l'agglomération bruxelloise. Et si le
saint qui le patronne n'a pas, en le protégeant, réalisé une sorte de
miracle continu et permanent.

Il n'y a là aucune illusion, aucune exagération. Représentons-nous que la
vigne a couvert jadis cette terre bénie et que le vin qu'on y récoltait
était célèbre. Les ducs de Bourgogne ont trouvé le site tellement
captivant qu'ils y firent construire un château et qu'ils l'habitèrent
pendant longtemps. Au XVe siècle, un grand poète, J.B. Houwaert y créa un
domaine que l'on appelait le «Petit Venise». Et ce n'est pas tout ! On
n'en a pas fini lorsque l'on a parlé de la beauté de St-Josse. Il y a son
hospitalité, sa gentillesse, son humeur accueillante. Du XVIe au XIXe
siècle, un artiste ou un homme d'état ne passera pas dans le voisinage
sans se sentir aussitôt attiré par les délices de l'endroit. Après 1789 et
1848, on parlera du «Faubourg des Exilés », tant il est notoire que les
réfugiés y ont afflué des quatre coins de l'Europe. Tôt après, ce sont des
artistes que l'on rencontrera en foule à l'avenue des Arts et rue de la
Chanté. On qualifiera alors le quartier de «Petit Montmartre».

Mais nous voilà en plein XIXe siècle... Or, il s'agit là de la période
qu'Yvonne du Jacquier a choisie pour nous en entretenir...
Ecoutons-la !

Ou plutôt, lisons les pages que voici...
C'est un sujet que leur auteur connaît mieux que personne.